Il faut être rebelle, hors-la-loi, vaurien pour brûler une université, lieu où se prépare l’avenir de toutes les nations. L’Université Cheikh Anta Diop, fierté de tout un peuple, a été incendiée par des «étudiants» rebelles. Heureusement, un communiqué du Rectorat informe que les documents portant sur les droits et devoirs de l’Ucad, notamment en matière de délivrance de diplômes, d’attestations d’authentification et d’équivalences, sont saufs. Et pour les archives de la Faculté des lettres et sciences humaines, le Rectorat renseigne que seul le dépôt annexe a été flammé, dont environ 20 000 dossiers d’étudiants affectés.
Le Conseil académique de l’Université, réuni le 12 juin, sous la présidence du Recteur de l’Ucad, Professeur Ahmadou Aly Mbaye, rassure que les archives détruites n’ont aucun impact sur la mémoire de l’Université.
L’Université Cheikh Anta Diop de Dakar a été le théâtre d’opérations inédites, le 1er juin, après la condamnation à deux ans de prison ferme contre l’opposant politique sénégalais, Ousmane Sonko, pour corruption de la jeunesse, à une amende de 600 000 francs Cfa et au versement solidaire de vingt (20) millions de francs Cfa de dommages et intérêts avec sa co prévenue Ndèye Khady Ndiaye condamnée à deux (2) ans ferme pour incitation à la débauche, à la plaignante, Adji Sarr. Laquelle poursuivait Ousmane Sonko pour viols répétés et menaces de mort, infractions disqualifiées en corruption de la jeunesse. Quelques heures après l’annonce du verdict par la Chambre criminelle du Tribunal de Dakar, les partisans du politiciens ont mis la capitale sens dessus-dessous. Même si ces manifs des 1er, 2 et 3 juin n’ont pas eu l’ampleur de celles du 3 au 6 mars 2021,des saccages et actes de vandalismes ont été constatés.
Le Temple du savoir vandalisé
Le Sénégalais est connu en Afrique et dans le monde pour aimer les études. La preuve par les cadres sénégalais qui excellent dans de nombreuses institutions internationales et le passage de nombreux chefs d’Etat et autres sommités mondiales pour leurs humanités à l’Université de Dakar, la meilleure en Afrique francophone, selon le classement eduranking.org., un classement indépendant basé sur une évaluation de plus de 14 000 universités de 183 pays. Aussi son saccage lors des manifestations du 1er juin a-t-il mondialement choqué. Certains doutent même que cette casse et ces actes de vandalisme soient l’œuvre d’étudiants sénégalais. Vrai et faux.
C’est où le Rectorat ?
La mise à sac de la Faculté de Médecine et de Pharmacie de l’Ucad révèle que des forces occultes se sont fondues dans la masse estudiantine. Un agent de sécurité rencontré sur les lieux et témoin des faits raconte que ce jour-là, des pillards demandaient où se trouve le Rectorat ? «Ça démontre que nous n’avions pas uniquement affaire à des étudiants. Quand ils sont venus ici (Fac Médecine), ils ont incendié la voiture de fonction du Doyen de la Faculté qui rentre toujours avec son véhicule personnel et gare la voiture de fonction dans la cour de la Faculté. Après, ils ont lancé des cocktails Molotov dans la salle des archives et de la comptabilité matière. Il y avait de nombreuses machines neuves (photocopieuses, cartouches d’encre, rames de papier, ordinateurs…)», explique l’agent de sécurité. Puis, les pilleurs se sont dirigés vers le bâtiment central. Faute de pouvoir y accéder, les «étudiants» rebelles enlèvent le mât du drapeau national pour briser les vitres de l’entrée principale de la Fac médecine. Là aussi, ils seront bloqués par les grilles métalliques de sécurité. Preuve que les étudiants ont été infiltrés, des manifestants, sacs au dos, via l’autre flanc du bâtiment, saccagent un bureau avant de s’introduire dans le magasin de la Fac pour dérober du matériel de plomberie, de jardinage, d’électricité… Ensuite, ils font cap sur le bâtiment de la Fac Pharmacie où des étudiants, décidés à défendre leur lieu d’études, leur barrent la route. Du coup, les rebelles, avec des machettes, brisent la résistance des étudiants et incendient les trois bus de convoyage du personnel administratif et cassent toutes les vitres du bâtiment. «Le pire a été évité de justesse, le bâtiment de la Fac Pharmacie comptant de nombreux laboratoires avec des produits inflammables et de nombreuses bouteilles de gaz que les flammes n’ont heureusement pas touchés», explique un des responsables de la sécurité. Une voiture du service laboratoire a aussi été caillassée et les bancs publics ont été renversés.
L’école de journalisme saccagée
Le Centre d’études des sciences et techniques d’informations (Cesti) a payé aussi un lourd tribut dans la journée du 1er juin. Une foule immense a pris d’assaut cette école de référence qui a formé plusieurs journalistes africains de renommée. «N’ayant cure de la présence des vigiles, les manifestants ont directement rallié les deux salles de conférence qu’ils ont complètement réduites en cendres, avant de mettre à feu les deux voitures du personnel. Ils n’ont pu accéder au bâtiment central, fermé mais les flammes ont endommagé l’électricité», l’un des vigiles.
Le Centre des œuvres universitaires de Dakar (Coud) détruit
La Directeur du Coud, Maguette Sène qui avait réussi à changer le visage de l’Ucad en l’embellissant sur tous les plans (espaces verts, nouveaux pavillons, moyens de transport…), largement ovationné (fait inédit) par des étudiants pour son travail remarquable et remarqué, a vu ses bureaux incendiés lors de cette journée du 1er juin. Les locaux de la direction générale du Coud ont été dévastés (bureaux, chaises, postes téléviseurs, lampes…), tous les véhicules du personnel incendiés. Les deux nouveaux pavillons N et X de trois (3) niveaux en face de la direction du Coud en finition ont été vandalisés. «Nous avions affaire à des voleurs. Ces gens n’étaient pas venus uniquement par manifester. Des étudiants de l’Ucad font bien partie des pillards, mais ils ont été infiltrés», expliquent deux vigiles desdits pavillons. «Parmi eux, certains portaient des sacs à dos. Tout le matériel de plomberie qui était dans le magasin a été emporté. Même les sacs des ouvriers contenant leurs outils et tenues de travail ont été dérobés, tout comme les seaux de peinture. Près de 54 matelas neufs seront brûlés, les extincteurs emportés et qui sont utilisés pour éteindre les grenades lacrymogènes lancées par les policiers. La peinture, elle, sert à confectionner les cocktails Molotov», confient les vigiles. Et de poursuivre : «Vous voyez, ce magasin était fermé, mais Ils se sont servis d’un marteau pour l’ouvrir et voler le matériel. Quelqu’un qui manifeste a-t-il besoin de porter par dévers lui un marteau?». Signalant un graffiti au nom de «Sonko » sur la chaussée en face du Pavillon A, il dit : «C’est avec les sceaux de peinture volés qu’ils ont fait ce graffiti.» Le chef de la sécurité du Coud note que les pavillons B, F, G, H, D, E…ont été vandalisés.
L’espace du musicien Oumar Pene vandalisé
Un espace dans l’enceinte de l’Ucad porte le nom du chanteur Oumar Pène, très aimé de la jeunesse sénégalaise, particulièrement estudiantine. Inauguré récemment en présence des autorités universitaires et de l’enseignement supérieur, il a été vandalisé, l’écran géant détruit, les vitres du bâtiment principal abritant un cafétéria brisées.
La Faculté de Droit perd son chapiteau
Le chapiteau érigé depuis quelques années par la Faculté de droit pour faire face au nombre pléthorique d’étudiants, a été incendié lors des manifestations du 1er juin. Il ne reste plus rien dans ce chapiteau où des étudiants de la Fac droit et de la Fac Lettres suivaient leurs cours. Les bâtiments centraux n’ont pas été touchés par les pyromanes, mais des vitres de l’entrée principale de la Fac droit ont été cassées, une voiture stationnée à la devanture calcinée.
Le décor est le même à la Faculté des lettres où le car de transport du personnel a été incendié. Un autre véhicule stationné au Rond-point de la Fac médecine a été aussi réduit en cendres. (Publié dans le N°10 du Magazine Afrique Demain août-septembre)
